Michel Jeanne fait partie des quelque 300 prêtres diocésains français
partis outre Atlantique au titre du « Pôle Amérique latine » de
l'épiscopat de France. Mais, alors que la plupart des
engagements étaient de trois ou cinq ans renouvelables une ou deux fois,
cette présence est devenue « à vie » pour un certain nombre d autres.
Ce fut le cas de Michel Jeanne qui y mourut après trente-trois ans
d'enfouissement dans la communauté humaine à laquelle il avait été
envoyé. Mais d'où venait chez Michel cette radicalité au service des
travailleurs de Colombie, dans l'esprit et dans le temps ? D'abord de
son expérience de jeune prêtre en France. Ordonné en 1960 à l'âge de
vingt-sept ans, il est pendant dix ans vicaire à Saint-Etienne du
Rouvray, banlieue ouvrière de Rouen. Il y vit un temps de grande
intensité au service du monde ouvrier. Une fois arrivé en Colombie, sa
vie a été dédiée jusqu'à son dernier souffle à ce qu il appelle « La
pastorale ouvrière » à laquelle s'ajoutera à partir de 1982 une
insertion dans « La pastorale ordinaire » à travers la vie paroissiale.
Il deviendra même par deux fois créateur de nouvelles paroisses dans les
quartiers pauvres et constructeur d'« églises bâtiments » afin de faire
naître des « églises communautés ». Une deuxième racine mais peut-être
la plus déterminante marque et qualifie son ministère en Colombie autant
qu en France. C'est son appartenance aux Fraternités Jésus Caritas,
branche de la famille Charles de Foucauld qui regroupe des prêtres
diocésains. Il y puisa une communion à la personne très concrète de
Jésus de Nazareth et sa détermination à rester au service des plus
pauvres en partageant leur vie autant que faire se peu. Un troisième
pôle, non choisi celui-là, est, à partir de l'été 1990, le cancer de
l'arrière-nez qui va bientôt lui ronger le côté gauche du visage jusqu'à
le défigurer et contre lequel il va physiquement lutter, jusqu'à ce
qu'il en meure, en janvier 2003, au coeur de sa dernière paroisse
colombienne.
José Fuquen, prêtre du diocèse de Bogotá, fut l'un des plus proches
compagnons de Michel Jeanne. Marie Legrand, proche parente de Michel,
aujourd'hui professeur d'espagnol à Rouen, a fait de nombreux séjours en
Colombie où elle a suivi de près la présence de Michel dans les milieux
les plus pauvres.
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